Inepsy Last days / Kontemps / After the bombs 22 avril 2006, 6 dollars saphir
Et voilà, cela fait dix ans que je suis là. Que je sous-vis de ce côté de l’Atlantique. Dans cette Nouvelle France où les ascenceurs semblent ne pas exister, à avoir traversé tous les milieux montréalais et s’être fait continuellement montré la porte. Mais, à la différence de pas mal, je suis un survivant. Au bout de dix ans, chiffre non officiel, 75 % des Français installés repartent dans la mère patrie ou ailleurs (et les autres?). Le mythe ne fonctionne plus et faudrait peut être y regarder plus près... Pas mes affaires. Moi je suis encore là à vivre dans la Belle Province qui a perdu de son charme depuis lurette et qui se trouve plus proche de la Vieille France, qu’elle ne le pense, sur des questions de racisme, de conception du monde et de fermeture aux influences extérieures. Dos à dos. Face à face intenable et récriminations immuables en attendant que d’un coté comme de l’autre, on s’attelle à dépasser l’arrogance des uns et le groulxisme des autres –si je peux dire-. Arrogants et bougons comme d’habitude sans autres alternatives. C’est pour cela que je suis bien dans tous les scènes punks les plus dures. Elles me protègent car elles sont en phase avec une réalité directe, dure et tellement réelle que l’on voudrait absolument l’écraser, la voir disparaître, la nier. Un punk peut pas se cacher d’être punk. Et j’en ai croisé à Montréal qui malgré leurs jolis sourires et leurs positions de dominations, sadomaso même, étaient plus pourris que le petit punk du coin. Surtout dans une société où tout est régi au millimètre près, calculé sur vingt cinq ans, pensé et soupesé sans fin. À ce niveau, la moindre remise en cause du modèle, c’est faire acte de dissidence (comme en monde soviétique fut un temps), d’opposition. Être considéré comme un « anarchiste ». Imagines un peu le choc…..Il y a dix ans. À mon arrivée ici, en 1996, après le non au référundum et les chocs économiques inhérents à cette « agitation », l’ambiance montréalaise était très lourde et très dure. Une récession locale s’était installée. M’enfin, il y avait quelques shows intéressants à voir de temps en temps. On peut pas imaginer. Un soir j’ai préféré aller les planet smashers qui débutaient plutôt que enemy soil. Le concert des Planet se tenait à Salaberry. On peut pas imaginer. C’était une soirée cabaret….petites tables rondes, petite bougie, lumière tamisée…..Une soirée granola…et à l’époque la plupart des concerts étaient comme cela. Enfin, ce soir là, en rentrant où je coloué sur St Laurent/Duluth, il y avait les brigades anti-émeutes déployées sur toute la rue, des vitrines brisées, etc…. Le concert « punk » qui jouait plus haut, avait explosé en émeute et pas mal pété la maine. C’était l’ambiance qui régnait à Montréal. La chasse aux punks, aux squeegees, etc, qui étaient considérés comme des sales emmerdeurs dans la plus parfaite des sociétés au monde. Il a fallu attendre que la salle de l’X ouvre (suite à cette émeute) et aussi l’action de certains de la Constellation pour le punk à Montréal commence à se « normaliser » comme ailleurs en Euroland ou aux usa. Mais, il y a dix ans…c’était pas facile d’être punk, ou de se proclamer punk à Montréal. Aujourd’hui, on commence à en voir les aspects positifs et intéressants culturellement parlant (voir la diversité des groupes et quelques trop RARES labels). L’émergence des scènes punks à Montréal a nettoyé les vieux discours ringards et débilisants, les vieilles façons de penser et de faire issus des 70s babas made in corpo. Certes, il reste à faire mais des fois, je prends à rêver que là où je suis est là où je vis et qu’en théâtre, en danse, en littérature, en « pensées », des punks iront foutre un bordel rédempteur et ouvrir leur société soit-disante « conciliatrice ». Un peu d’air cela fait pas de mal! En tout cas, musicalement, c’est fait même si c’est juste le début. Alors quelle fut ma surprise de voir un show punk de 4 groupes montréalais booké en plein St Laurent, dix ans, jour pour jour, après les émeutes sur cette Main. Voici le retour du punk en face de Gallimard. YES ! Je vous demande pas de déviner lequel est plus vivant ? Le club est bien : un cube tout noir, une bonne sono, et une belle scène. Ah super. Pas mal de monde encore. Cela se confirme : il y a du monde au show, un public punk crust, skin, metal, jeune et vieux et complètement mixte. Quelques tables de presse, du tshirt, du vinyl (etc) à vendre. Ouah, on se croirait à la Loudhouse en plein centre ville. Putain y a dix ans…Fais pas chier….avec le passé dépassé. Last Days commence le show. Meilleur son que la dernière fois, set plus dur et plus intéressant. (avec un exBallast signifiant pour ceux qui connaissent Ballast et son ep sur stonehenge records en France : vous allez être intéressés par eux. Key Word-mot clé.). C’est un groupe qui a bien progressé et qui durcit son son. La démo ne reflète plus la force de Last Days. À suivre sur vinyl avec d’autres titres ? (http://www.myspace.com/lastdays514). Puis viens Kontempt. Là encore, j’ai pas pris le temps de vraiment écouter la démo k7 de 2004 (the end of the destructor) et encore moins de la chroniquer. J’aime bien le côté anti-cimex, brutal, noisy, trash. Kontempt, tout y est : le look, l’énergie et les morceaux avec un chanteur qui a une belle présence bien dure sur scène. Good. Puis c’est au tour des After the Bombs. 4 ga’ et une chanteuse. Un gros hardcore très crossover, très Amebix et évidemment très Nausea. De très bons passages, un très bon set, un gros espoir du hardcore montréalais. Un ep déjà sorti en Norvège et introuvable ici. http://www.myspace.com/afterthebombs). Puis vient Inepsy. Cela fait un moment que je les ai pas vu sur scène. Leur concert débute par Who’s next et puis tout s’enchaîne. Leur son est meilleur, plus rock, plus groovy ainsi que leurs présences scéniques. Un bon show là encore et bien rodé, avec un côté mélodique plus prononcé et un sacré following des Punks de Montréal. Soirée tranquille qui finit tôt. Soirée surréaliste tant il y a dix ans, aucun groupe punk aurait pu jouer sur cette partie de St Laurent. On imagine pas le chemin parcouru. À l’image du parcours de tous ces punks de Montréal. À l’image de Janick, la chanteuse d’After the Bombs qui dans une récente entrevue dans une petite revue, racontait un peu comment elle était devenue punk et comment le punk, les voyages à NYC et en Europe, l’X et, bientôt on espère, les Katakombes (une nouvelle salle qui remplacerait le vide des bétonneurs laissé par l’X), l’avait aidé à reprendre le « contrôle » de sa vie, à arrêter de se laisser faire et à s’investir dans sa vie quoiqu’il arrive. Vive le Punk des punks vivants ! Belle victoire que ce retour sur St Laurent.