PANCRACE fluid hammer (Penultimate Press 2019)

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En ce 12 mai, il était de mon devoir de célébrer comme il se doit le deuxième saint de glace (entre saint Mamert et saint Servais), ces saints de glace sont bien connus des jardiniers qui savent qu'il ne faut rien planter avant la fête des ces trois là sous peine de grosse déconvenue gélive ;-) C'est donc ce jeune Pancrace de Rome mort  assassiné à l'âge de 14 ans et béatifié qui est célébré par nombre d'églises chrétiennes en ce 12 mai. Point historique nécessaire pour s'attacher maintenant au lieu de résidence initial de notre quintet du jour, puisque PANCRACE, composé par Prune Bécheau, Arden Day, Julien Desailly, Léo Maurel et Jan Vysocky, a  débuté en 2015 lors d'une résidence à l'église Saint Pancrace à  Dangolsheim ville où vit le luthier et créateur Léo Maurel sus nommé. Ce génial Léo Maurel a la curiosité ancrée en lui, le jeu aussi, il crée son orgue appelé 'organus' spécialement pour le groupe et initie PANCRACE à la création d'un disque pour le moins étonnant et essentiel. PANCRACE bidouille des vieilleries organiques, outre l'orgue de l'église, s'affaire autour de uilleann pipe, de radios, via des contrôleurs MIDI, via des Rasberry PI, des synthétiseurs, ces cinq là vont marier l'ancien et le nouveau, la corde frottée et l'électricité, la bande magnétique et la mémoire SSD, l'orgue du grand père et la modernité de la robotique actuelle. Tout le disque est là.  C'est donc à cinq têtes et dix bras que les morceaux se créent, le rythme des moteurs donnent le rythme aux morceaux ou au souffle d'un instrument à vent branché sur une machine à quatre temps. Les créations alternent entre une pop éclopée à la façon d'un Pierre Bastien et des expériences sonores et mécaniques qui dissonent; on est entre  improvisation et conception robotique d'une mélodie cacophonique où chaque timbre d'instrument a été précisément étudié et agencé pour établir au final un double vinyle au caractère particuliers et  essentiel. Tout en restant très robotique, le flux et le reflux des machines provoquent ici un souffle continu, là un rythme de train fantôme, "in the evening" est incroyable de mécanique mélodique, "sacre" a le goût polyrythmique des pistons de moteurs qui clapotent simultanément, et qui se superposent, 'incipit lamentatio' a la larme à l'oeil,  le bourdon mélancolique et le ullin pipe sacrément touchant. Alternent des passages de tranches de vie entre une personne agée découvrant la modernité de quelqu'un plus jeune, personne qui essaie justement de lui expliquer sa modernité. "Internet c'est comme un gros téléphone, c'est le même principe que le minitel."  Pas simple d'être jeune, même si plus tout jeune. PANCRACE touche juste, que ca soit dans sa pochette-mélange-noir-et-blanc-couleurs que dans cette juxtaposition de machines et de timbres d'instruments acoustiques pour faire au final de ce second disque* un ovni musical touchant et novateur sur l'incroyable Penultimate Press !

* enregistré au Grand Théâtre d'Albi en 2018.

https://www.penultimatepress.com/